La foi, à quoi ça sert ? me demandait ma jeune nièce il
y a quelque temps… A rien, lui répondis-je, sauf que çà me fait vivre depuis 76
ans et des poussières… C’est vrai, j’ai essayé de vivre ma vie humaine le mieux
possible et à ce point de vue ma foi ne m’a pas fait changer de chemin. Sauf
qu’elle a donné un sens à beaucoup de choses de ma vie. Sans elle, parfois je
n’aurais pas bien su pourquoi les réaliser.
Ce dimanche nous est donné comme une occasion de faire retour
sur notre vie. Saint Paul dit aux Hébreux et donc à nous en ce jour :
« La foi, c’est une façon de posséder ce que l’on espère, un moyen de
connaître ce que l’on ne voit pas. » Il est vrai que nous aimons
expérimenter ce qui touche notre vie et nous voyons très clairement que bien
des choses sont incompréhensibles aux simples yeux humains. L’homme voudrait
bien tout comprendre et en même temps les choses importantes de la vie lui
échappent souvent. C’est le cas des grands sentiments qui sont les nôtres.
Allez donc vraiment définir pourquoi nous aimons davantage un être qu’un autre
au point de vouloir vivre avec lui toute une vie. Allez dire pourquoi un Père
Hamel assassiné il y a quelques jours avait donné sa vie entièrement à Dieu et
à l’humanité. Dans la foi, ces actes essentiels d’une vie prennent tout leur
sens. Nous sommes invités en ce dimanche à nous redire ce que la foi nous donne
de vivre, de voir comment cette vie de foi donne sens à tous nos gestes, à nos
paroles, à nos actions.
Je pense à tous ces évènements que nous vivons depuis des
mois et qui se sont accélérés ces derniers temps. Beaucoup sont douloureux,
incompréhensibles. J’étais en Savoie et un de mes jeunes voisins me parlait du
terroriste vivant à Aix les Bains. Il a passé le bac en même temps que lui et
avait de bonnes relations avec lui. Il me disait toutes ses questions devant
cet assassinat incompréhensible. Et lui qui ne se dit pas spécialement croyant
semblait se reposer la question de Dieu dans tout çà. Il me disait :
« Mais qu’est-ce qu’il fait lui là-haut ? » Que répondre sinon
que Lui là-haut Il nous demande à nous de vivre et de témoigner de son amour
pour tous les hommes, même nos ennemis. Nous sommes encore dans cette année de
la miséricorde. Comment vivre cette miséricorde au cœur de ce monde bouleversé,
et bouleversant ? J’aime beaucoup François notre Pape. C’est un homme de
foi et pour lui croire l’engage forcément dans l’action. François est quelqu’un
qui fait ce qu’il dit, qui fait ce qu’il croit. Je pense à notre frère, le Père
Hamel. Sans doute sans cet odieux assassinat serait-il resté dans un strict
anonymat. Mais nous l’avons entendu, cet homme âgé, tout donné à son ministère,
capable de créer des ponts entre les hommes, cet homme représente cette
catégorie de prêtres que nous connaissons bien dans notre secteur, ces prêtres
comme nos Pères Guy et Louis qui, à un âge certain, continuent à servir, à
célébrer, à accompagner. Je pensais à eux en lisant l’Evangile :
« Heureux ces serviteurs que le Maître, à son arrivée, trouvera en train
de veiller… » Oui, veiller, mais pas endormis, ils sont bien éveillés. Ils
contemplent ce monde avec l’œil bienveillant de ceux qui aiment, de ceux qui
ont tout donné et qui continuent à tout donner. Ils célèbrent le pardon et le
vivent au quotidien dans une maison de retraite. Ils vivent leur service comme
des intendants fidèles de la grâce du Seigneur. Comme Abraham, ils entendent encore
et toujours l’appel du Seigneur à quitter leur pays, à aller plus loin. Comme
Sarah, ils savent rire, éclater de rire devant les merveilles du Seigneur,
presqu’incrédule devant les propositions qu’Il vient leur faire. Comme elle,
ils engendrent encore et encore à la foi celles et ceux qui se confient à eux.
Et leur exemple est là pour nous stimuler parce que nous recevons le même appel
à aimer, à inventer des chemins d’avenir pour notre humanité, pour nos proches
et pour tous nos amis lointains. Nous sommes invités à vivre la fraternité, à
grandir en humanité, à aller vers l’autre, le différent, à n’être indifférents
à aucune détresse humaine ou spirituelle. Le Pape a dit au jeune de ne pas
rester assis sur leur divan. Je crois bien qu’il nous le dit à nous
aussi : « Ne restez pas figés dans vos certitudes, vos
habitudes, vos courtes vues. Allez de l’avant, le Seigneur vous attend et vos
frères les hommes avec lui… »
L’eucharistie n’est pas un geste statique, mais un appel à
l’action de grâce, un appel à présenter au Christ les joies et les tourments du
monde et à les porter avec lui au Père. Que notre unité provoque l’unité de
l’Eglise et du monde.
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